Le débat d'hier est une expression quasi parfaite de pourquoi la 5ème République est d'une nature bourgeoise fondamentalement réactionnaire, et pourquoi historiquement les progressistes ont toujours dénoncé ce régime comme d'une très grande agressivité anti-démocratique.

Sarkozy et Hollande sont apparus comme deux « champions » ; les idées et la raison passent à l'arrière-plan, devant un « combat des chefs », un affrontement de personnalités.

Quel que soient ses idées à la base, le « citoyen » est alors censé les abandonner et choisir son « champion. » C'est une personnalisation visant à anéantir la politique, c'est un véritable coup d'Etat intellectuel et culturel.

Mitterrand, dans « Le coup d'Etat permanent », critiquait le gaullisme et considérait que la Vème République, c'était De Gaulle + la police. Le président pouvait passer outre toutes les institutions. Mais Mitterrand ne remettait pas réellement en cause l'élection du président au suffrage universel.

Mitterrand ne prônait pas un régime parlementaire, et pour cause. La France a toujours suivi la logique où le président était un monarque élu, et la période parlementaire n'a été que temporaire et surtout toujours décriée comme « instable. »

La France bourgeoise est ainsi, toujours et par nature, celle du régime fort. D'ailleurs, le vainqueur ce dimanche sera celui qui aura donné l'impression d'être le plus apte à être le « chef. » Ici, les deux candidats font part égale, et Sarkozy dispose d'une grande tradition à ce petit jeu là.

Et ce d'autant plus que le culte patriarcal du « chef » sans contenu va de pair avec le légitimisme.

Tout cette logique est dans la nature de la 5ème république, et si Hollande gagne, c'est parce qu'il sera un « mâle alpha » considéré comme plus apte.

La seule organisation à avoir compris cela en France, et à avoir rejeté la 5ème république pour cela, a été le Parti Communiste, qui s'est effondré par incapacité de combattre celle-ci, une incapacité directement issue du triomphe du révisionnisme en son sein.

La 5ème république pose la victoire du candidat à la présidentielle comme un préalable pour exister ; sans cela, on est au mieux qu'un appendice du candidat qui « a une chance. »

C'est justement ainsi que les socialistes ont phagocyté le Parti « communiste », et c'est pourquoi l'écologie n'arrive nullement à s'exprimer, Europe écologie ne suivant pas une ligne de masse mais une logique purement institutionnelle.

Et une démonstration absolument terrible de cela est comment l'esprit moqueur français, typiquement petit-bourgeois, dénué de tout contenu, s'approprie cette fausse polarisation.

La page de tweets « LeDebat » se situe parmi les pics mondiaux...

On se moque, en quelques lignes, ou en une image ; on ne critique pas, on dénonce ; on étudie pas, on survole et on lance des piques. On joue au Matamore, on est plein de rodomontades ; on célèbre l'attitude faussement rebelle, et vraiment superficielle.

Voilà bien l'esprit de la 5ème république, un régime de démocratie bourgeoise organisée sur un mode autoritaire, avec la fonction de « nationaliser » les points de vue politiques et culturels, afin de les mobiliser dans un sens institutionnel.

Construire un pôle irréductible – le Parti de la science – est la seule réponse appropriée pour arriver à un changement authentique ; tout le reste n'est qu'un soutien à la restructuration du régime, un replâtrage nationaliste !