5 aoû 2006

Quelle est la nature du régime du Venezuela de Chavez?

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Chavez représente un courant historique.

Celui des bourgeoisies nationales qui tentent de s'émanciper de l'impitoyable domination de l'impérialisme US et des oligarchies locales, en s'appuyant sur les impérialismes concurrençant les USA.

Il le reconnaît lui-même, en ayant comme grande référence Ezequiel Zamora, militaire vénézuélien chef de la bourgeoisie métisse et libérale contre les conservateurs, liés aux ex colons espagnols, lors de la guerre civile de 1859-1863.

Ce courant n'est pas nouveau. Il a toujours existé, et est toujours passé par l'armée. L'Egyptien Nasser, le Libyen Kadhafi, l'Argentin Peron, le Zaïrois Mobutu.... tous ces militaires ont mené des putschs et ont eu par la suite une énorme sympathie des masses populaires pour leur politique nationaliste.

Chavez n'échappe pas à ce profil. Il est passé par l'Académie militaire du Venezuela, où il a eu un diplôme de Sciences et Arts Militaires; il a ensuite étudié les sciences politiques à la faculté, pour obtenir une maîtrise, puis fondé sa propre idéologie entre « capitalisme et communisme », pour tenter deux putsch militaires. 

Son « Mouvement Bolivarien Révolutionnaire 200 » avait pris naissance à l'occasion le 24 juillet 1983 du 200ème anniversaire de la naissance de Bolivar, figure militaire historique de la révolution bourgeoise sud-américaine par en haut.

La conclusion du parcours de Chavez sera une élection triomphale à la présidentielle, par un « putsch légal » grâce à l'aura révolutionnaire que sa position putschiste militaire a pu lui donner.

Son « Movimiento Quinta República, MVR » (Mouvement pour la Cinquième République), fondé pour l'élection de 1998, va aller de triomphe en triomphe : le 25 avril 1998, juste après la présidentielle, 80% des voix (et une participation de 40% des inscrits) soutient l'idée de nouvelle constitution; le 15 décembre 1999, ce sont 55% des inscrits qui votent oui à 71,4% à la nouvelle constitution, la « constitution bolivarienne du Vénézuéla. »

Chavez est réélu président le 30 juillet 2000, lors des nouvelles élections promises, et le MVR remporte 76 des 165 sièges de l'Assemblée nationale, ainsi que les gouvernements de 12 des 23 régions administratives du pays.

 

Un triomphe formidable, qui ne va pas sans l'armée.

Ainsi, lorsque Chavez prête serment le 2 février 1999, Chavez annule le défilé militaire... pour le reporter au 4 février, date anniversaire du premier putsch qu'il avait tenté !

Comme on le voit, il s'agit bien d'une révolution. Mais d'une révolution par en haut.

Une preuve de cela est dans la politique étrangère de Chavez.

On dit qu'il est anti-impérialiste, parce qu'il s'oppose aux USA, mais affirmer cela, c'est nier les contradictions inter-impérialistes.

Chavez représente une classe faible, la bourgeoisie nationale, et celle-ci a besoin d'appui : elle se dirige donc vers les puissances impérialistes opposées aux USA.

Voilà pourquoi Chavez a dit : «Nous voulons devenir des fournisseurs sûrs et continus de pétrole en France », pourquoi il a également rendu son pays dépendant de la Russie impérialiste, bourreau de la Tchéchénie, en achetant un milliard de dollars d'armement, tout cela parce que les USA ne voulaient rien lui vendre.

De même, lorsqu'il a rencontré le dictateur fasciste Loukachenko, il a affirmé: «Ici, je me suis fait un nouvel ami et nous devons fonder une équipe ensemble. Ce sera une équipe combative », niant ainsi la dépendance complète de la Biélorussie vis-à-vis de la Russie et en en faisant même une qualité en disant que Loukachenko s'était «opposé à une fausse démocratie qui est en fait une dictature des oligarques transnationaux.» 

De la même manière, il a nié la présence énorme des impérialismes français et allemand en Iran, affirmant simplement : «Nous nous tiendrons aux côtés de l'Iran à tout moment et dans n'importe quelles circonstances. » « Si nous sommes unis, nous pouvons non seulement résister mais aussi faire échec à l'impérialisme.»

Evidemment, puisque Fidel Castro avait fait passer Cuba de la sphère US à la domination social-impérialiste russe, en ce sens il est logique qu'il soit un grand modèle pour Chavez.

Voilà pourquoi Chavez dit : « Je suis un danger pour l'oligarchie colombienne, équatorienne, bolivienne, brésilienne, argentine... »

Avec cette ligne, Chavez se pose en allié de l'impérialisme pour aller « piquer » d'autres pays aux USA, tout en rêvant de bourgeoisies nationales sud-américaines se libérant totalement : c'est le vieux rêve de son second modèle avec Zamora, Bolivar : Bolivar voulait faire s'unir les pays d'Amérique latine pour pouvoir chasser les colonisateurs, car il savait que les bourgeoisies nationales étaient trop faibles. 

Il se pose également en chef des masses populaires dans leur lutte contre l'oligarchie; il reprend d'ailleurs la méthode cubaine : en plus de ce soutien des puissances impérialistes, la bourgeoisie nationale a besoin d'un soutien intérieur, car l'ancienne oligarchie est encore liée aux USA et entend bien reprendre les rênes du pays.

Voilà pourquoi il y a le modèle cubain d'aides sociales, de politique de la santé avec des soins gratuits, de mobilisations de masse nationalistes, d'augmentation du budget de l'enseignement et d'alphabétisation générale, d'élévation des retraites, etc.

Et naturellement de réformes agraires. Car le grand allié de l'oligarchie, du capitalisme bureaucratique vendu à l'impérialisme, c'est la classe des grand propriétaires terriens.

Voilà pourquoi, dans une improvisation quasi totale et avec un contrôle absolu de l'Etat, plus de deux millions d'hectares ont été confié à 160 000 familles paysannes, et pourquoi la nouvelle constitution dit : «Le régime des grandes propriétés foncières est contraire à l'intérêt social.»

Mais Chavez ne peut pas détruire la classe des grands propriétaires terriens, seulement l'affaiblir.

Il ne peut pas détruire la propriété privée, politique de la classe ouvrière.

Il ne peut donc pas toucher à ces grands propriétaires terriens qui possèdent 80% des terres alors qu'ils représentent 5% des propriétaires de terre.

Alors il distribue des terres non productives, afin de contrebalancer le pouvoir des grands propriétaires terriens et de renforcer le capitalisme dans les campagnes. 

De la même manière, il ne peut pas toucher aux banques, car la bourgeoisie nationale n'a pas les moyens de former une classe étatique comme l'a fait la bourgeoisie cubaine sous l'égide du social-impérialisme russe.

Alors il généralise le micro-crédit étatique et bloque autant que possible l'indexation des intérêts des prêts privés.

Il ne peut également pas toucher aux multinationales contrôlant le pétrole, alors il tente de se vendre aux impérialistes le plus offrant, selon les intérêts de la bourgeoisie nationale et contre les oligarques vendus.

Mais justement, quelles sont donc les possibilités de Chavez?

Selon la théorie marxiste-léniniste-maoïste il n'y en a aucune.

Le bolivarisme, tout comme le kémalisme, le nassérisme et toutes les conceptions du même genre, sont des révolutions par en haut, qui ne veulent pas de la participation des masses paysannes au processus.

D'ailleurs c'est le général Alberto Müller Rojas qui avait proposé le « Jour de la patrie », à l'Assemblée nationale et l'élaboration du « Manifeste socialiste du XXIe siècle ». On est loin des masses populaires. 

Ces idéologies prétendent lutter contre l'impérialisme, mais en fait elles amènent seulement au mieux un changement de maître. La bourgeoisie nationale n'est pas assez forte; elle se transformera au mieux en bourgeoisie bureaucratique vendue à l'impérialisme.

Voilà pourquoi, selon le marxisme-léninisme-maoïsme, l'actualité dans les pays opprimés consiste en la révolution de nouvelle démocratie, guidée par la classe ouvrière et s'appuyant sur les vastes masses paysannes, consistant en la révolution armée anti-impérialiste et anti-féodale.

Chavez peut bien se revendiquer de Simon Rodriguez, intellectuel tuteur de Bolivar qui a dit que l'Amérique latine devait avoir des institutions nationales « originales », tout cela n'est que du vent.

Il n'y a pas de troisième voie et non le « Christ » n'était pas le premier « socialiste », comme Chavez l'a dit. Chavez peut d'ailleurs bien bricoler ce qu'il veut :

« Nous avons établi alors ce que nous avons appelé « l'arbre aux trois racines », qui est notre source idéologique. Il y a la racine bolivarienne (ses idées d'égalité et de liberté, sa vision géopolitique de l'intégration de l'Amérique latine), la racine zamorienne (d'Ezequiel Zamora, le « général du peuple souverain » et de « l'unité civico-militaire ») et la racine robinsonienne (de Simon Rodriguez, le maître de Bolivar dit « Robinson », le sage de l'éducation populaire, de la liberté et de l'égalité). Cet « arbre aux trois racines » a donné la substance idéologique à notre mouvement. »

Tout cela n'a aucun sens.

Ce qu'ont enseigné précisément les auteurs communistes, comme Mariategui au Pérou ou Kaypakkaya en Turquie, c'est que la révolution nationale par en haut est directement dirigé contre les possibilités d'une révolution agraire, et consiste en le fascisme.

Les « régimes nationaux » ne peuvent pas s'empêcher de tomber dans les bras des impérialistes; ils perdent nécessairement leur « indépendance. »

Leur discours républicain n'est là que pour adapter l'Etat selon les besoins des dominants, dans le sens de moderniser la domination sur les campagnes ainsi que le capitalisme bureaucratique, car la bourgeoisie nationale ne peut plus être le principal protagoniste de la révolution démocratique.

Rien n'est plus faux que de penser que les pays opprimés sont capitalistes, que la bourgeoisie nationale domine et fait ce qu'elle veut : en réalité ces pays sont des pays semi-coloniaux, semi-féodaux, caractérisés par la domination du capitalisme bureaucratique vendu à l'impérialisme ainsi que celle des grands propriétaires terriens dans les campagnes.

« Le capitalisme bureaucratique a cinq caractères:

1) Le capitalisme bureaucratique, c'est le capitalisme que l'impérialisme développe dans les pays arriérés et qui comprend les capitaux des grands propriétaires terriens, des grands banquiers et des magnats de la grande bourgeoisie.

2) Il exploite le prolétariat, la paysannerie et la petite bourgeoisie et limite la bourgeoisie moyenne.

3) Il passe par un processus qui fait que le capitalisme bureaucratique se combine avec le pouvoir de l'Etat et devient capitalisme monopoliste étatique, compradore et féodal; il en découle qu'en un premier moment il se développe comme grand capital monopoliste non étatique, et en un deuxième moment - quand il se combine avec le pouvoir de l'Etat - il se développe comme capitalisme étatique.

4) Etant arrivé au plus haut degré de son développement, il fait mûrir les conditions pour la révolution démocratique; et

5) Confisquer le capitalisme bureaucratique est la clé pour mener à bonne fin la révolution démocratique, et décisif pour passer à la révolution socialiste. » (Gonzalo)

Telle est la thèse marxiste-léniniste-maoïste.

Pour le PCMLM, août 2006. 

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