2 nov 2012

Ce que montre "l'aide" du Qatar à Gaza

Submitted by Anonyme (non vérifié)

Mardi 23 Octobre, l'émir du Qatar, Hamad Ben Khalifa Al-Thani, s'est rendu en délégation dans la bande de Gaza pour y annoncer l'octroi d'une « aide » de 400 millions d'euros. Cette visite est éclairante à plus d'un titre sur les changements tactiques des puissances impérialistes vis-à-vis de la nation arabe.

Il est maintenant notoire que le Qatar est le principal bailleur de fonds des forces islamistes salafistes dans les pays de culture musulmane. Plus précisément, le Qatar appuie partout où c'est possible les émanations des Frères Musulmans, qui représentent la tendance la plus conservatrice / petite-bourgeoise du salafisme.

Mais le Qatar apportent aussi son soutien financier ou culturel (par la reconnaissance diplomatique ou médiatique grâce à son trust télévisuel Al Jazeera) à des forces salafistes plus radicales comme en Libye, au Mali ou encore avec les talibans afghans.

S'il fait cela, c'est en premier lieu pour faire pression sur les partis islamistes arrivés au pouvoir après les prétendues « révolutions arabes » dans le cadre de sa lutte d'influence avec la Turquie et l'Arabie saoudite pour le leadership sunnite. C'est par exemple ce qui se passe en Tunisie où le Qatar finance l'agitation fasciste salafiste pour faire pression sur le parti islamiste Ennahda qui était au départ plus ou moins dans l'orbite de la Turquie.

Le Qatar fait aussi cela pour se rendre indispensable aux impérialistes et se vendre le plus cher possible. C'est par exemple ce qu'il fait en finançant largement les islamistes maliens ou les islamistes libyens, ou bien en se lançant dans des projets en France, depuis le Paris Saint-Germain devant se transformer en objet culturel indispensable, jusqu'à un tiers-mondisme islamisé où sombre une partie de l'anarchisme.

En fait, le Qatar n'est qu'un rabatteur au service de l'impérialisme. Il finance des mobilisations fascistes islamistes dans les pays arabes ou de culture musulmane sunnite, puis les vend aux impérialistes comme moyen de rénover la bourgeoisie compradore locale usée et ainsi tuer dans l’œuf de vraies mobilisations révolutionnaires. Les islamistes servent aux impérialistes à réimpulser la mobilisation et le contrôle des masses pour rénover les sociétés arabes sans les révolutionner.

Et le Qatar le fait principalement pour l'impérialisme français et l'impérialisme anglais comme nous l'avons montré.

Le Qatar sert d'intermédiaire à l'impérialisme, principalement français et anglais, pour continuer à s'accaparer les richesses de la nation arabe et des nations du culture musulmane sunnite. Il fait le « sale boulot » en finançant et appuyant les islamistes et permet ainsi à l'impérialisme français de mettre en avant un masque « démocratique humaniste ».

La preuve en est, par exemple, que malgré une prétendue « insurrection » islamiste au Nord du Mali, les installations du trust français Areva, qui occupe littéralement militairement des milliers de kilomètres carré, n'ont toujours pas été attaqué. Et même Areva s'apprête à inaugurer un site d'extraction encore plus gigantesque pouvant faire travailler jusqu'à 20 000 personnes.

Comprendre cette position particulière du Qatar dans le dispositif impérialiste français est important pour bien saisir la portée de la visite de l'émir du Qatar à Gaza ce 23 Octobre.

La visite du dictateur fasciste du Qatar à Gaza, accueilli comme un héros, rentre pleinement dans cette lutte d'influence impérialiste pour le contrôle de la nation arabe. Et particulièrement dans les deux foyers de lutte les plus aigus du moment : la lutte démocratique du peuple arabe de Palestine et la guerre menée pour le contrôle de la Syrie.

L'impérialisme français, appuyé par l'impérialisme anglais, cherche à rebondir sur les prétendues « révolutions » arabes pour augmenter sa sphère d'influence. Pour cela, il fait tomber les uns après les autres les dominos bureaucratiques qui jouaient sur la concurrence entre la Russie, les USA, l'Allemagne, l'Italie et la France.

Ainsi, l'impérialisme français a fait tomber Moammar Khadhafi en Libye pour y installer un gouvernement semi-féodal semi-bureaucratique avec l'appui des salafistes comme mercenaires. Il a appuyé les Frères Musulmans en Égypte. Et aujourd'hui il cherche à faire pression sur l'Algérie (qui essaie de se vendre à un autre impérialisme) par le biais de l' « insurrection » islamiste au Mali. Mais surtout, se mène aujourd'hui une lutte acharnée pour prendre le contrôle de la Syrie et de ses gisements de pétrole, de gaz et de phosphate.

La Syrie a longtemps été le pays qui encadrait les partis palestiniens – pour bien évidemment les stériliser en les vendant au social-impérialisme russe dans les années 1970 à 1990. Ainsi, les directions des différentes scissions du FPLP y avaient leur siège centraux, ainsi que l'OLP et bien sûr depuis les années 1990 le Hamas.

Mais avec le délitement du social-impérialisme russe, cette situation devait finir par s'écrouler. Et c'est ce à quoi on assiste aujourd'hui avec l'offensive conjointe des impérialismes français, allemand, anglais et dans une moindre mesure américain contre la Syrie.

Après deux décennies de dévoiements par les nationalistes bourgeois et les révisionnistes (avec l'appui des trotskystes du monde entier), la lutte démocratique du peuple arabe de Palestine est à l'agonie. La bourgeoisie compradore palestinienne de Cisjordanie se contente bien de vivre du détournement du milliard et demi de dollars par an d'aide internationale et les progressistes se sont très majoritairement fait absorber par l'opportunisme et ne pèsent plus grand chose.

Et donc, la réaction islamiste, poussée au départ par Israel et l'Arabie saoudite, est en train de finir de conquérir l'hégémonie culturelle au sein des masses et de la petite-bourgeoisie et est devenue la pièce maîtresse du contrôle des masses arabes de Palestine.

Sachant l'influence de la Syrie en perdition, se mène depuis plusieurs années une lutte entre la Turquie et le Qatar pour le contrôle du Hamas (et donc par derrière entre les USA, l'Allemagne et la France).

C'est ainsi qu'il faut comprendre les mobilisations des islamistes turcs autour des « bateaux pour Gaza » : le dévoiement d'une cause démocratique juste (la fin du blocus mortifère de la bande de Gaza) au profit de l'impérialisme, avec bien entendu le soutien permanent des trotskystes qui ont relayés ses initiatives dans les pays impérialistes. Et cela alors que la Turquie comme le Qatar entretiennent des liens de coopérations politiques, économiques et militaires étroits avec l'état d'Israel.

Mais cette lutte a été gagnée par le Qatar. Ainsi, depuis un an, la direction du Hamas a déménagé de la Syrie au Qatar. Cette visite en grande pompe est l'achèvement de ce processus, et parachève en même temps l'enterrement pour un certains temps de la révolution démocratique en Palestine. Le plan des impérialistes est qu'à terme l'émirat islamiste de Gaza soit réintégré comme province de l’Égypte sous domination des Frères Musulmans et que les bantoustans de Cisjordanie se retrouvent dans l'orbite d'une Syrie où les islamistes aurontt pris le pouvoir.

Cette « visite diplomatique » aux allures d'OPA annonce en fait l'imminence d'une intervention des impérialistes en Syrie. Intervention à laquelle les forces authentiquement révolutionnaires doivent s'opposer et qu'elles doivent essayer de faire échouer.

En effet, en obtenant la mainmise sur le Hamas, et donc les masses arabes de Palestine, par le biais du Qatar, l'impérialisme français a obtenu une position de force face aux autres impérialismes qui cherchent à s'emparer de la Syrie. Il peut ainsi lancer l'offensive finale contre la Syrie pour s'en emparer.

D'abord, l'impérialisme français obtient ainsi une capacité de mobilisation importante de par l'importante diaspora arabe palestinienne qui est présente en Syrie. Mais surtout il obtient une position dominante en se présentant comme la seule force qui pourrait, si ce n'est éviter, au moins limiter la gigantesque purification ethnique promise en cas de chute de Bachar El Assad.

En effet, le Hamas est un allié historique du Hezbollah (soutenu aussi par la France) et le Qatar et l'Iran sont des alliés contre l'Arabie saoudite et la Turquie pour la domination de la région. L'impérialisme français, bien qu'appuyant les salafistes, apparaît ainsi comme le protecteur des minorités non-musulmanes sunnites dans la région.

Le devoir des communistes dans les métropoles impérialistes est de s'opposer de toutes leurs forces à leur propre impérialisme, à la réalisation de ses plans de conquête. En France, aujourd'hui, montrer la moindre complaisance vis-à-vis des plans du Qatar, c'est soutenir objectivement l'impérialisme français pour qui il travaille.

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