La loi de la baisse tendancielle du taux de profit selon Marx : la productivité sociale du travail

La « loi de la baisse tendancielle du taux de profit » est la pierre angulaire du Capital de Karl Marx. C’est la thèse essentielle, qui détermine toute la position du matérialisme dialectique sur le mode de production capitaliste.

Le débat autour de cette thèse a été à l’origine d’un grand débat au début du mouvement ouvrier, dans la social-démocratie. Le révisionnisme – qui révisait donc le marxisme – affirmait que cette thèse de Karl Marx précisément était fausse, que le capitalisme pouvait grandir sans crise et que donc les ouvriers pouvaient en profiter et faire le socialisme par des moyens pacifiques.

Inversement, il a toujours été au coeur du mouvement communiste de préserver la compréhension scientifique de cette loi qui, il faut bien le souligner, concerne une baisse du taux de profit qui est « tendancielle ».

Cela signifie que l’appauvrissement généralisé des masses, s’accélérant passé un certain cap d’accumulation du capital, ne se produit pas de manière unilatérale, ni de manière uniforme, même s’il est de fait inéluctable.

Quelle est la base de la question ? C’est celle de la définition même de ce qu’est le capital.

En fait, on connaît le principe selon lequel au départ une entreprise produit des biens à un prix élevé, puis ensuite les produit en quantité beaucoup plus grande, à un prix moins élevé. Sur le papier, l’entreprise gagne autant, ayant simplement transféré ses profits du principe qualitatif au principe quantitatif.

En réalité, les choses ne se déroulent pas de cette manière. Raisonner ainsi, c’est avoir en tête une démarche commerciale, pas une démarche capitaliste au sens strict.

Car qu’est-ce que le capital ? Le capital c’est du travail accumulé, sous la forme matérielle. Les moyens de production relèvent des capitalistes, pas de la société toute entière ; c’est le principe de la propriété privée des moyens de production.

Ce capital emploie du travail vivant, des travailleurs, dans des ateliers, des usines, etc. ; on appelle capital fixe ou constant les machines, les bâtiments, etc. et capital variable le travail vivant des travailleurs, plus ou moins employés par les capitalistes.

Le jeu, l’équilibre, le rapport entre ces deux aspects du capital forment précisément la dynamique dialectique du capital en général.

En effet, le capitalisme développe les moyens de production. Ce faisant, il modernise la société, toute la société : il ne produit pas que plus de marchandises, il produit également les moyens de les produire, il les perfectionne toujours davantage.

La société devient alors de plus en plus performante sur le plan des moyens de production. Toute se rejoint, se relie ; les progrès de certains secteurs profitent aux autres secteurs, comme par exemple la téléphonie, l’informatique, les transports, etc.

C’est, pour prendre une image, celle des robots qui remplacent les ouvriers dans l’usine. C’est la productivité qui augmente, sur tous les plans.

Karl Marx constate ce principe en disant :

« En utilisant plus de machines en général, en employant davantage de capital fixe, le même nombre d’ouvriers transforme en produits une plus grande quantité de matières premières et auxiliaires dans un même laps de temps – c’est-à-dire avec moins de travail. »

C’est là le point essentiel : l’accumulation du capital ne signifie pas uniquement l’accumulation de marchandises, mais également l’accumulation des moyens de production. C’est précisément là que le capitalisme joue un rôle historiquement utile, unifiant la force de travail pour élever le niveau des moyens de production.

Karl Marx appelle cela la « productivité sociale du travail », et s’il parle de la baisse tendancielle du taux de profit, c’est parce que celle-ci résulte de celle-là.

Il dit ainsi :

« La tendance progressive à la baisse du taux de profit général est tout simplement une façon propre au mode de production capitaliste d’exprimer le progrès de la productivité sociale du travail. »

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